1. Qu’est-ce que l’effet Dunning-Kruger ?
L’effet Dunning-Kruger repose sur un paradoxe fascinant : moins nous maîtrisons un sujet, moins nous sommes conscients de notre ignorance. Ce phénomène psychologique, mis en lumière à la fin des années 1990 par les chercheurs David Dunning et Justin Kruger, démontre que le manque de compétence ne s’accompagne pas seulement d’erreurs… mais aussi d’une incapacité à les reconnaître.
En d’autres termes, lorsque nous savons peu, nous avons tendance à surestimer nos capacités, car nous ne disposons pas encore des repères nécessaires pour évaluer la complexité réelle du domaine. À l’inverse, plus nos connaissances s’approfondissent, plus nous mesurons l’étendue de ce qu’il nous reste à apprendre.
Dans le monde de l’entreprise, l’effet Dunning-Kruger se traduit souvent par un excès de confiance qui pousse à agir sans expertise suffisante. Cette attitude peut sembler synonyme d’audace ou d’agilité… mais elle devient problématique lorsque les décisions concernent des domaines techniques ou réglementaires.
Quelques exemples fréquents :
- Le créateur d’entreprise qui rédige seul ses contrats : animé par l’envie d’aller vite et d’économiser sur les frais juridiques, il prépare ses conditions générales de vente ou ses contrats de prestation à partir de modèles trouvés en ligne. Mais il ignore souvent que ces documents ne couvrent pas certains risques, ou qu’ils contiennent des clauses contraires à la loi, ce qui peut l’exposer à des litiges coûteux.
- L’indépendant qui s’improvise comptable : pensant « économiser » sur les honoraires d’un expert-comptable, il gère seul ses déclarations fiscales et sociales. Résultat : une erreur de calcul ou un oubli de déclaration peut entraîner des pénalités, voire un redressement fiscal qui annule totalement les économies réalisées.
- Le dirigeant qui croit connaître l’assurance professionnelle : certain de comprendre les besoins de son activité, il choisit une couverture minimale ou mal adaptée. Ce n’est qu’en cas de sinistre (dégâts matériels, litige client, perte d’exploitation) qu’il découvre que certaines situations ne sont pas couvertes… et qu’il devra assumer seul les conséquences financières.
3. Les conséquences pour les entrepreneurs
Sous l’effet Dunning-Kruger, l’entrepreneur agit avec une confiance démesurée, persuadé de maîtriser des sujets qu’il connaît en réalité de manière superficielle. Cette surestimation de ses compétences peut se traduire par plusieurs dérives dangereuses pour la pérennité de son activité.
Des décisions précipitées, sans analyse complète des risques
Convaincu d’avoir « tout compris », l’entrepreneur peut se lancer dans un projet ou prendre une décision stratégique sans procéder aux vérifications indispensables.
Par exemple : signer un contrat de partenariat sans le faire relire par un juriste, souscrire une assurance uniquement sur la base du prix sans vérifier les exclusions, ou embaucher un prestataire sans évaluer sa fiabilité. Ces choix rapides, motivés par l’impression de tout maîtriser, exposent l’entreprise à des problèmes juridiques, financiers ou opérationnels évitables.
Des erreurs coûteuses, qui auraient pu être évitées avec l’avis d’un expert
Lorsqu’on pense savoir, on néglige souvent l’apport d’un professionnel. Résultat : on s’aperçoit trop tard que l’on a mal rempli une déclaration fiscale, rédigé un contrat bancal ou choisi un régime social inadapté. Ces erreurs peuvent se traduire par :
- Des pénalités financières importantes.
- Des litiges longs et coûteux.
- Une perte de crédibilité vis-à-vis des clients et partenaires.
Dans bien des cas, une heure de conseil facturée par un expert aurait permis d’éviter des milliers d’euros de pertes.
Un faux sentiment de sécurité, qui retarde la mise en place de protections essentielles
L’effet Dunning-Kruger pousse à croire que « tout est sous contrôle »… jusqu’au jour où un imprévu met en lumière les failles. Ce biais est particulièrement dangereux dans les domaines liés à la protection de l’entreprise : assurance professionnelle, cybersécurité, contrats commerciaux.
Par exemple, un entrepreneur persuadé que sa responsabilité ne pourra jamais être engagée peut repousser la souscription d’une RC Pro. En cas de sinistre, il découvre trop tard que les conséquences financières peuvent menacer l’existence même de son activité.
Sortir de l’effet Dunning-Kruger ne consiste pas simplement à « être plus prudent ». Cela demande une posture active d’apprentissage, d’ouverture et de remise en question. Trois approches complémentaires peuvent aider tout entrepreneur à limiter les effets de ce biais.
Reconnaître ses zones d’ignorance
La première étape est d’accepter que l’on ne peut pas tout savoir. Dans l’entrepreneuriat, les domaines techniques comme le droit, la fiscalité, l’assurance, ou encore la cybersécurité, évoluent constamment et demandent des connaissances spécialisées.
Cette lucidité n’est pas un signe de faiblesse mais une marque de maturité professionnelle. Savoir dire « je ne maîtrise pas ce point » ouvre la porte à de meilleures décisions, car elle pousse à aller chercher l’information ou l’expertise là où elle se trouve.
Chercher un regard extérieur
Un œil externe, surtout s’il est qualifié, a le pouvoir de détecter des angles morts que l’on ne perçoit pas soi-même.
- Un avocat peut repérer une clause problématique dans un contrat.
- Un expert-comptable peut identifier une erreur qui pourrait coûter cher lors d’un contrôle fiscal.
- Un courtier en assurance peut révéler des lacunes dans une couverture que l’on croyait complète.
Ce regard critique agit comme un filet de sécurité. Il permet de corriger les erreurs avant qu’elles ne se transforment en crises, et d’optimiser les choix stratégiques.
Plus on apprend, plus on mesure l’étendue de ce qu’on ignore encore. Cet effet, souvent appelé « humilité intellectuelle », est l’antidote naturel au Dunning-Kruger.
En se formant régulièrement — que ce soit via des formations en ligne, des ateliers spécialisés ou des conférences professionnelles — l’entrepreneur gagne à la fois en compétences réelles et en capacité à juger de ses limites.
Cette démarche permet aussi de mieux dialoguer avec les experts : comprendre leur langage, poser les bonnes questions, et intégrer leurs recommandations dans une vision globale de l’entreprise.
5. L’assurance professionnelle : un domaine où l’effet Dunning-Kruger coûte cher
Parmi les domaines où l’effet Dunning-Kruger frappe le plus durement, l’assurance professionnelle figure en bonne place. Beaucoup d’entrepreneurs estiment en connaître « l’essentiel » et se contentent de souscrire une couverture minimale, souvent choisie uniquement sur le critère du prix. Pourtant, sans analyse fine des risques propres à leur activité, cette approche peut se révéler désastreuse.
Payer pour des garanties inutiles
Faute de compréhension précise des clauses, certains entrepreneurs se retrouvent à financer des garanties qui ne correspondent pas à leur activité ou qui font doublon avec d’autres contrats. Par exemple, payer pour une assurance couvrant des risques liés au transport de marchandises alors que l’entreprise n’expédie jamais de produits. Cet argent pourrait être mieux investi dans des protections réellement adaptées, ou dans la prévention des risques.
Oublier des protections vitales
À l’inverse, l’illusion de compétence peut conduire à négliger des garanties essentielles.
- La RC Pro (Responsabilité Civile Professionnelle) protège en cas de dommages causés à des tiers dans le cadre de l’activité.
- L’assurance multirisque professionnelle couvre les locaux, équipements et stocks contre les sinistres (incendie, dégât des eaux, vol, etc.).
- La garantie perte d’exploitation compense les revenus perdus après un sinistre empêchant l’activité de se poursuivre.
Ignorer ou minimiser l’importance de ces protections peut mettre en péril la survie de l’entreprise après un incident.
Se retrouver exposé à des frais astronomiques
Un sinistre mal couvert peut avoir des conséquences financières bien plus lourdes que le coût d’une cotisation annuelle. Un dégât matériel, un litige client ou une cyberattaque peuvent générer des dépenses dépassant largement les capacités de trésorerie d’une petite structure. Dans certains cas, l’absence de couverture adéquate peut mener à la fermeture définitive de l’entreprise.
Le rôle clé du courtier spécialisé
Prendre conseil auprès d’un courtier en assurance professionnelle permet de dépasser l’illusion de compétence. Ce spécialiste :
- Identifie les risques spécifiques à l’activité.
- Compare objectivement les offres du marché.
- Évite les doublons et les manques dans les garanties.
- Ajuste la couverture au fur et à mesure que l’entreprise évolue.
En somme, le courtier agit comme un partenaire stratégique : il comble les angles morts, sécurise l’activité et optimise le budget consacré à la protection.