Un diplôme d’État obligatoire pour exercer
Avant de pouvoir exercer en tant qu’infirmier libéral, il est impératif d’obtenir le Diplôme d’État d’infirmier (DEI). Ce diplôme est la seule voie légale pour accéder à la profession, quel que soit le futur statut envisagé (salarié ou indépendant). Il se prépare en Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI), agréé par le ministère de la Santé, sur une durée de 3 ans à temps plein.
Le cursus est structuré en 6 semestres mêlant cours théoriques, travaux pratiques et plus de 2100 heures de stage clinique, dont une partie peut être effectuée en services de soins à domicile, permettant aux futurs libéraux d'appréhender les réalités de terrain.
L’accès à cette formation se fait en priorité via la plateforme Parcoursup, mais des voies spécifiques existent pour les aides-soignants, auxiliaires de puériculture ou personnes en reconversion professionnelle via la validation des acquis de l’expérience (VAE) ou des concours passerelles.
L’infirmier libéral étant seul responsable de ses actes, la formation initiale vise à le préparer à intervenir avec rigueur et discernement dans des contextes variés et parfois complexes. Elle repose sur quatre piliers :
- Sciences infirmières et biomédicales : anatomie, physiologie, pathologies chroniques, pharmacologie… autant de bases solides indispensables à la prise en charge de patients à domicile.
- Éthique et communication : une part essentielle de la relation avec des patients souvent âgés, dépendants ou isolés.
- Techniques de soins : maîtrise des actes courants (injections, pansements, perfusions) et gestion des situations d’urgence sans encadrement direct.
- Responsabilité professionnelle : connaissance du cadre légal, des normes d’hygiène, de la traçabilité des soins et des obligations déontologiques.
Les stages pratiques permettent de découvrir différents contextes de soins (hospitalier, médico-social, libéral…), avec la possibilité d’observer ou d’accompagner des infirmiers déjà installés en exercice indépendant. Ces expériences sont précieuses pour les étudiants envisageant une orientation en libéral à la fin de leur diplôme.
Conditions d’accès et critères de sélection
Pour s’inscrire dans un IFSI et accéder à la formation menant au DEI, le candidat doit :
- Être titulaire du baccalauréat (ou d’un diplôme équivalent de niveau 4). Aucune spécialité n’est imposée, mais un bon socle scientifique est un atout.
- Réussir la procédure d’admission via Parcoursup (dossier, lettre de motivation, parfois entretien).
- Être à jour de ses obligations vaccinales, notamment la vaccination contre l’hépatite B, exigée pour les stages en milieu de soins.
En pratique, les candidats qui ambitionnent une activité libérale doivent démontrer dès leur parcours de formation une forte autonomie, un sens de l’organisation, et une bonne gestion du relationnel, trois compétences indispensables à l’exercice indépendant.
2. Une pratique autonome mais exigeante
L’infirmier libéral exerce de manière indépendante, hors d’un établissement de santé. Il intervient principalement au domicile des patients, parfois en cabinet, et organise lui-même sa tournée. Ce mode d’exercice attire de nombreux professionnels pour la liberté d’action, la variété des situations cliniques rencontrées, et la relation de proximité tissée avec les patients.
Une grande autonomie dans l’organisation du travail
Contrairement à un infirmier salarié, le libéral choisit ses horaires, son secteur géographique, et peut décider de travailler seul ou en collaboration avec d’autres infirmiers, au sein d’un cabinet de groupe ou dans un pôle de santé. Cette autonomie lui permet d’adapter son emploi du temps à ses préférences personnelles ou familiales — même si les soins à domicile impliquent souvent des déplacements très matinaux, le week-end ou les jours fériés.
L’infirmier libéral peut se constituer sa propre patientèle, travailler sur prescription médicale et établir une relation de confiance sur le long terme avec les personnes qu’il soigne.
Des responsabilités administratives importantes
Ce statut suppose aussi une gestion rigoureuse, car le professionnel est à la fois soignant… et chef d’entreprise. Il doit :
- Gérer sa comptabilité (recettes, dépenses, amortissements…)
- Effectuer ses déclarations fiscales et sociales (URSSAF, impôts, retraite, caisse CARPIMKO…)
- S’occuper de la facturation et des télétransmissions avec l’Assurance Maladie (via le système SESAM-Vitale ou un logiciel métier)
- Tenir ses dossiers patients à jour, conformément aux obligations légales
Il doit également respecter les règles du conventionnement avec la Sécurité sociale (si applicable), notamment en ce qui concerne les tarifs, les cotations d’actes et les modalités de remboursement.
3. Des obligations légales et réglementaires
Exercer en tant qu’infirmier libéral ne se limite pas à prodiguer des soins : c’est aussi intégrer un cadre juridique strict, conçu pour garantir la sécurité des patients et la qualité des prises en charge. Avant même le premier acte, le professionnel doit se conformer à une série de démarches administratives, déontologiques et réglementaires. Ces obligations assurent non seulement la légitimité de son exercice, mais aussi sa bonne intégration dans le système de santé. Tour d’horizon des principales règles à connaître pour exercer en toute conformité.
Inscription à l’Ordre national des infirmiers et à l’Agence Régionale de Santé (ARS)
L’inscription à l’Ordre national des infirmiers est une condition sine qua non pour exercer en libéral. Elle atteste de l’aptitude professionnelle du soignant, de son engagement à respecter le code de déontologie et lui permet de figurer sur le tableau de l’Ordre, véritable registre officiel des infirmiers autorisés à exercer.
En parallèle, une déclaration d’activité doit être réalisée auprès de l’Agence Régionale de Santé (ARS) dont dépend le professionnel. Cela permet son enregistrement dans le répertoire des professionnels de santé, condition indispensable pour obtenir ensuite un numéro Adeli.
Obtention du numéro Adeli
Délivré par l’ARS, le numéro Adeli (Automatisation DEs LIstes) constitue l’identifiant officiel de l’infirmier libéral. Il permet :
- De justifier de son droit d’exercer,
- D’être reconnu par les organismes de sécurité sociale et les caisses de retraite,
- D’émettre des feuilles de soins électroniques ou papier,
- Et d’effectuer toutes les démarches administratives nécessaires (facturation, conventionnement, affiliation à la CARPIMKO, etc.).
Ce numéro est personnel, unique et doit figurer sur tous les documents professionnels.
Choix et déclaration d’un statut juridique
L’infirmier libéral est un travailleur indépendant, ce qui implique de choisir un statut juridique adapté à son mode d’exercice. Plusieurs options sont possibles :
- Micro-entreprise : idéale pour débuter, elle offre un fonctionnement simple et allégé, mais avec un plafond de chiffre d’affaires limité.
- Entreprise Individuelle (EI) : plus souple que la société, elle engage néanmoins le patrimoine personnel (sauf avec le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée).
- Sociétés d’exercice libéral (SEL, SELARL) ou Sociétés Civiles de Moyens (SCM) : recommandées pour les cabinets de groupe ou les associations d’infirmiers, elles permettent de mutualiser les charges et d’optimiser la fiscalité.
Le choix du statut a des conséquences sur la gestion comptable, le montant des cotisations sociales, le niveau de couverture sociale (retraite, indemnités journalières) et la protection en cas d’arrêt d’activité.
Conventionnement avec l’Assurance Maladie
Pour que ses actes soient remboursés par la Sécurité sociale, l’infirmier libéral doit demander son conventionnement auprès de la CPAM (Caisse Primaire d’Assurance Maladie). Ce conventionnement implique un engagement à respecter plusieurs éléments :
- Les tarifs conventionnels fixés par la nomenclature générale,
- Les cotations précises des actes selon la NGAP (Nomenclature Générale des Actes Professionnels),
- Les règles de facturation et de télétransmission via le dispositif SESAM-Vitale.
En cas de non-respect (surcotation, absence de justificatifs, erreurs répétées), le professionnel s’expose à des contrôles, des redressements, voire à des sanctions financières ou disciplinaires.
Respect de la traçabilité des soins et des obligations numériques
L’infirmier libéral est tenu de garantir la traçabilité complète des soins réalisés, ce qui implique :
- La tenue rigoureuse de dossiers patients, mentionnant les actes réalisés, leur date, leur contexte et leur prescription.
- L’utilisation d’un logiciel de gestion agréé pour la facturation et la télétransmission des données de soins.
- La capacité à justifier chaque acte facturé en cas de contrôle par les organismes de santé.
Enfin, comme tout professionnel manipulant des données de santé à caractère personnel, l’infirmier libéral doit se conformer au RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données). Cela implique notamment de :
- Sécuriser l’accès aux données numériques,
- Informer les patients de leurs droits,
- Mettre en place des procédures en cas de fuite de données.
Responsabilité Civile Professionnelle (RC Pro), une assurance obligatoire pour exercer
L’assurance Responsabilité Civile Professionnelle (RC Pro) est légalement obligatoire pour tout infirmier exerçant à titre libéral. Elle constitue la protection de base de l’activité, couvrant les dommages corporels, matériels ou immatériels que le professionnel pourrait causer à un patient, un tiers ou un collaborateur, dans le cadre de son exercice. Cette assurance est exigée avant même le démarrage de l’activité, et doit pouvoir être justifiée à tout moment en cas de contrôle ou de litige.
La RC Pro intervient notamment dans les cas suivants :
Erreur de soin : mauvaise injection, oubli de retrait d’un matériel médical, mauvaise interprétation d’une prescription médicale.
- Acte mal exécuté : pansement mal posé entraînant une surinfection, mauvaise administration d’un traitement, chute d’un patient pendant une mobilisation.
- Défaut d’asepsie : infection nosocomiale contractée à domicile suite à un soin non conforme aux règles d’hygiène.
- Conseil inadapté ou négligence : absence d’alerte en cas d’aggravation de l’état du patient, oubli de consigner une information cruciale dans le dossier.
Même une piqûre mal réalisée peut entraîner une complication grave, comme un hématome compressif, une atteinte nerveuse ou une infection. Dans ces cas, la RC Pro prend en charge les frais de défense, les dommages-intérêts, ainsi que les frais annexes liés à la procédure engagée contre l’infirmier.
En tant que professionnel de santé autonome, l’infirmier libéral engage sa responsabilité personnelle à chaque acte. Une simple plainte, même infondée, peut avoir des conséquences juridiques et financières lourdes. C’est pourquoi il est essentiel de choisir une RC Pro spécifiquement conçue pour les professions paramédicales, incluant :
- La prise en charge des actes dérogatoires autorisés à domicile (soins palliatifs, perfusions, actes techniques spécialisés…),
- La couverture en cas de remplacement ou de collaboration avec un autre infirmier,
- La protection en cas de litige avec un patient ou la famille,
- Une garantie étendue aux fautes involontaires, imprudences ou négligences.
Certaines compagnies proposent également des options complémentaires : protection juridique, garantie des frais de retrait de matériel défectueux, ou encore responsabilité environnementale en cas de rejet de déchets médicaux.