1. Un cas typique de faute professionnelle
Dans le monde professionnel, le devoir de conseil est une obligation implicite dès lors qu’un expert est sollicité pour son savoir-faire. Lorsque ce devoir est mal rempli — par exemple à travers un conseil erroné, mal formulé, incomplet, ou tout simplement inadapté au profil ou aux besoins du client — cela peut engager votre responsabilité civile professionnelle. Ce type de situation est juridiquement qualifié de faute professionnelle.
Ce risque est particulièrement fréquent dans les métiers de service intellectuel, de conseil ou de création, mais également dans les professions réglementées qui imposent des obligations de moyens ou de résultats. Cela inclut notamment les consultants, les avocats, les experts-comptables, les architectes, les coachs, les graphistes ou encore les professionnels de la santé non médicale (diététiciens, naturopathes, etc.).
Quelques exemples concrets
- Consultant en stratégie : vous recommandez à votre client une méthode de croissance ou un modèle économique qui s’avère irréalisable. Résultat : le client subit des pertes financières importantes.
- Graphiste : vous livrez un fichier destiné à l’impression, mais le format n’est pas conforme aux exigences techniques de l’imprimeur. Cela entraîne des délais et des surcoûts pour votre client, qui doit tout refaire.
- Naturopathe : vous proposez un programme alimentaire standardisé sans avoir vérifié les antécédents médicaux du client. Résultat : il subit des troubles digestifs ou des carences.
- Développeur web: vous proposez une solution technique qui nuit à la performance commerciale du site de votre client.
Ce que dit votre assurance RC Pro
Dans la plupart de ces cas, la RC Pro peut être mobilisée, car le préjudice subi par le client découle directement de votre prestation intellectuelle.
Mais attention : pour que votre contrat joue, il doit impérativement couvrir les dommages immatériels, c’est-à-dire les préjudices non corporels et non matériels, comme une perte financière, une perte d’exploitation, une perte de chance ou une atteinte à la réputation.
On distingue notamment :
- Les dommages immatériels consécutifs : par exemple, la perte de chiffre d’affaires liée à une mauvaise livraison de fichiers ou de matériel.
- Les dommages immatériels non consécutifs : plus difficiles à couvrir, ce sont des pertes pures, sans événement matériel déclencheur, comme un mauvais conseil en stratégie ou en gestion.
2. Vérifiez les exclusions et limites de votre contrat RC Pro
La RC Pro est conçue pour vous protéger, sous réserve des garanties réellement souscrites et des exclusions prévues au contrat. Comme tout contrat d’assurance, elle est encadrée par des conditions, des limites de garantie et des exclusions qu’il est essentiel de connaître avant de croire être protégé.
Certaines situations, fréquentes dans la pratique, peuvent exclure votre droit à indemnisation. Voici les plus courantes :
Si vous dispensez un conseil sans disposer des compétences ou des qualifications exigées par la loi, l’assureur peut refuser de vous couvrir.
Exemple : un professionnel non diplômé qui se fait passer pour un psychothérapeute ou un conseiller fiscal alors que la profession est réglementée.
En cas d’absence d’habilitation, ou d’exercice illégal d’une activité réglementée, votre RC Pro est inopérante, car le contrat est basé sur une fausse déclaration ou un défaut d’éligibilité.
Activité non déclarée dans le contrat
La RC Pro ne couvre que les activités mentionnées dans le contrat au moment de la souscription. Si vous exercez une activité complémentaire ou secondaire que vous n’avez pas déclarée, elle ne sera pas protégée.
Exemple : un développeur web qui se met à faire de la formation ou du conseil SEO sans avoir ajouté ces prestations à son contrat.
Toute extension d’activité doit être signalée à votre assureur afin que la garantie soit adaptée à votre réalité professionnelle.
Préjudice purement financier sans prestation identifiable
Certains préjudices sont qualifiés de dommages immatériels non consécutifs, et ne sont pas automatiquement couverts par la RC Pro. Ce sont des pertes financières sans lien direct avec une erreur matérielle ou un sinistre visible.
Exemple : un conseil stratégique erroné qui entraîne une baisse de performance commerciale, sans qu’aucun défaut technique ou matériel ne soit en cause.
Ce type de dommage doit faire l’objet d’une garantie spécifique, souvent en option ou incluse uniquement dans des contrats haut de gamme. Sans cela, l’assureur peut refuser d’indemniser le client.
Faute intentionnelle
Si vous agissez en connaissance de cause, c’est-à-dire si vous donnez un conseil que vous savez risqué, faux ou dangereux, votre responsabilité ne sera pas couverte.
Exemple : un professionnel recommande une solution qu’il sait obsolète ou inadaptée, dans le seul but de vendre une prestation.
En droit des assurances, une faute intentionnelle ou dolosive annule systématiquement la garantie, car elle relève d’un comportement volontaire et malhonnête.
3. Ce que vous devez faire pour être bien couvert par votre RC Pro
Souscrire une RC Pro est une excellente précaution… mais encore faut-il que le contrat soit adapté à votre activité réelle. Un oubli, une mauvaise déclaration ou une lecture trop rapide des garanties peut entraîner une absence de couverture le jour où vous en avez besoin. Voici les actions essentielles à mener pour éviter toute mauvaise surprise :
Vérifiez la garantie des dommages immatériels
De nombreux sinistres professionnels donnent lieu à des préjudices immatériels, c’est-à-dire non corporels et non matériels). Or, certains contrats excluent ou limitent fortement cette couverture, en particulier pour les dommages immatériels non consécutifs. Vérifiez bien si :
- la garantie est incluse de base ou en option,
- les plafonds d’indemnisation sont suffisants,
- la franchise reste raisonnable.
Déclarez l’ensemble de vos activités
Votre RC Pro ne couvre que les activités que vous avez expressément déclarées à l’assureur. Si vous développez de nouvelles prestations, même complémentaires (ex. : conseil, formation, vente de logiciels, création de contenu, etc.), vous devez mettre à jour votre contrat.
Un oubli peut entraîner un refus d’indemnisation, même si vous êtes de bonne foi.
Demandez une attestation ou une confirmation écrite
En cas de doute sur la portée de votre couverture, n’hésitez pas à solliciter une attestation spécifique ou une réponse écrite de votre assureur ou courtier. Cela peut être utile :
- avant de signer un contrat avec un client exigeant,
- si vous intervenez dans un domaine sensible ou réglementé,
- ou tout simplement pour sécuriser juridiquement votre activité.
Un court message comme : « Ma RC Pro couvre-t-elle les dommages immatériels non consécutifs dans le cadre de mes prestations de conseil ? » peut faire toute la différence.