1. En résumé
- La responsabilité civile professionnelle (RC Pro) peut couvrir un retard uniquement s’il résulte d’une faute non intentionnelle (erreur, omission, négligence) ayant causé un préjudice réel, prouvé et directement lié à ce retard.
- Les assureurs examinent notamment la nature du délai (légal, contractuel ou réglementaire), l’intention du professionnel (les fautes volontaires sont exclues par l’article L113-1 du Code des assurances) et les preuves du dommage subi par le client.
- Les retards délibérés, les pénalités contractuelles prévues dans un contrat et les retards sans préjudice chiffrable sont le plus souvent exclus, sauf disposition contraire dans votre contrat.
- Chaque contrat RC Pro comporte ses propres garanties et exclusions : lisez attentivement les conditions générales et particulières pour vérifier si les retards et pertes financières pures (« dommages immatériels non consécutifs ») sont couverts.
2. Les différents types de retards
Il est essentiel de distinguer les différents types de délais auxquels un professionnel peut être soumis :
- Délais légaux : imposés par la loi (ex. : déclaration fiscale, dépôt de comptes, formalités sociales).
- Délais réglementaires : fixés par un organisme de tutelle ou un code professionnel.
- Délais contractuels : définis entre les parties dans un contrat (ex. : livraison, remise de rapport).
- Délais de bon usage : engagements moraux ou pratiques, sans force obligatoire.
3. Trois conditions à réunir
Pour que la RC Pro s’applique, trois éléments doivent coexister :
- Une faute non intentionnelle imputable au professionnel ;
- Un préjudice réel et prouvé subi par un tiers (client, partenaire, fournisseur) ;
- Un lien de causalité direct entre la faute et le dommage.
Le simple fait d’un retard ne suffit jamais à déclencher la garantie RC Pro : il faut une faute caractérisée et un dommage démontré.
4. Ce que vérifient les assureurs
Lorsqu’un sinistre est déclaré, l’assureur analyse plusieurs points :
- La nature du délai (et son fondement juridique ou contractuel) ;
- Le caractère intentionnel ou non de la faute (les fautes volontaires ou dolosives sont exclues selon l’article L113-1 du Code des assurances) ;
- Les preuves du préjudice subi ;
- Les garanties et exclusions prévues au contrat.
Chaque situation est examinée au cas par cas, car le retard constitue souvent une zone grise en matière de RC Pro.
5. Cas pratiques : quand la RC Pro peut (ou non) intervenir
La RC Pro peut vous couvrir si...
- Un consultant en stratégie digitale remet un rapport avec deux semaines de retard, empêchant son client de répondre à un appel d’offres. Si le retard résulte d’une mauvaise estimation (faute non intentionnelle) et que le contrat inclut la garantie des dommages immatériels consécutifs ou non consécutifs, le client peut être indemnisé.
- Un expert-comptable omet une formalité sociale entraînant des pénalités : la RC Pro peut intervenir si la faute est involontaire.
- Un maître d’œuvre tarde à transmettre un dossier de conformité à cause d’une mauvaise coordination : si la faute est reconnue, la RC Pro peut indemniser le donneur d’ordre.
La RC Pro ne vous couvrira pas si...
- Le retard est volontaire (ex. : pour exercer une pression commerciale).
- Le contrat prévoit des pénalités de retard : ces sommes relèvent d’un engagement contractuel, rarement assurable sauf clause spécifique.
- Le client ne prouve aucun dommage concret : un retard sans préjudice chiffrable ne suffit pas à engager la garantie.
Même lorsqu’un retard est couvert, un sinistre déclaré peut impacter la prime, la franchise ou le renouvellement du contrat. Mieux vaut donc prévenir.
Bien analyser son contrat RC Pro
- Vérifiez les exclusions relatives aux retards et pénalités.
- Vérifiez si votre contrat couvre les dommages immatériels non consécutifs (pertes financières pures), souvent exclus sans option spécifique.
- Renseignez-vous sur les extensions de garantie proposées pour votre profession.
Sécuriser vos engagements
- Définissez clairement les délais et livrables dans vos contrats.
- Prévoyez des marges de sécurité dans vos plannings.
- Évitez les clauses de pénalités automatiques trop lourdes, rarement indemnisables.
Communiquer en cas de difficulté
- Prévenez immédiatement vos clients si un retard est prévisible.
- Conservez toutes les traces écrites (mails, échanges).
- Proposez des solutions alternatives pour limiter le préjudice et éviter une déclaration de sinistre.